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Boulevard Kamputchea Krom

5 avril 2011

Epilogue... ou pas !

Depuis mon départ, des choses ont changé à l'orphelinat avec de bonnes nouvelles, mais aussi une mauvaise. Les bonnes : plusieurs enfants ont été adoptés au cours de ces derniers mois et l'orphelinat a enfin déménagé et offre, parait-il un peu plus de confort. La mauvaise : un des bébés est mort cet hiver.

De mon côté, j'ai rencontré une équipe des Enfants du Mékong et il y aurait une possibilité d'intégrer l'orphelinat dans leur programme de soutien. Reste à monter un dossier... et à croiser les doigts.

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11 juin 2010

Paris, vendredi 11 juin

Mon avion a atterri ce matin. Mine de rien, je suis contente de retrouver la France, Paris, mon appart, les CD qui pendouillent au balcon de mes voisins d'en face.

Bien sûr, le temps est gris, le taxi a mis du temps pour arriver parce qu'il ne prenait pas les couloirs de bus en contre-sens et qu'il respectait les sens uniques. Les enfants à qui j'ai souri à l'aéroport m'ont jeté un regard soupçonneux, et dans la rue, personne ne m'appelle d'un joyeux "hello, madam !". Je sais que dans quelques jours, je serai moi aussi redevenue une vraie Parisienne, méfiante, fermée, hargneuse. Mais en attendant, station Belleville, je vois un vieux couple d'Asiatiques. Et tout d'un coup, j'ai envie de courir vers eux en me criant de m'adopter.

9 juin 2010

Phnom Penh, mercredi 9 juin

Dernier jour à Phnom Penh. Ma valise est presque bouclée. Je suis allée pour la troisième fois dire au revoir à Rath et aux bénévoles encore sur place. J'ai fait mes dernières emplettes.

Je déjeune à la pizzeria du Sorya center, "le" centre commercial à l'occidental de Phnom Penh où les Cambodgiens, riches ou pas, viennent adorer la déesse Consommation, comme nous le faisons dans nos propres temples. Certains déambulent dans les allées du supermarché et se contentent d'admirer tous ces produits avec une sorte de respect. D'autres, l'air renfrogné et hautain, s'en saisissent et passent à la caisse.

J'ai l'impression d'être dans un sas de décompression. Les Cambodgiens qui m'entourent ont l'air fermé, concentré, important que je vais retrouver au simple contact de Paris. A côté de moi, dans la pizzeria, une bande d'enfants fêtent un anniversaire à grands coups de Coca Cola. La plupart d'entre eux sont bien grassouillets, tout comme la jeune femme qui les accompagne et demande à payer la note avec sa carte Gold. C'est rare, des enfants cambodgiens grassouillets. Il aura fallut attendre mon dernier jour pour en voir ! Je pense à mes minots, aux bébés avec leurs grands yeux, leurs bras tout maigres et leur gros ventre. Et j'ai envie de pleurer.

8 juin 2010

Phnom Penh, mardi 8 juin

Me voilà de retour à Phnom Penh après seulement 4h de route. Pas d'accident, pas de panne, la climatisation marchait parfaitement. Bref, rien à dire. Je suis presque déçue.

7 juin 2010

Bokor, lundi 7 juin

Bienvenue___Bokor__Ah Bokor ! J'y pense depuis que je suis arrivée au Cambodge, alléchée que je suis par la description de mon guide : une ancienne station climatique bâtie par les Français et détruite par les Khmers rouges, qui l'ont laissée à l'état de ville fantôme... Si c'est pas l'aventure, ça !

7 h du mat. Nous sommes une douzaine à nous entasser dans un mini-van. Le groupe est essentiellement composé de jeunes Australiens et Américains. Comme je comprends un mot sur 10, je lâche la conversation et me concentre sur le paysage.

Au pied de la montagne, stop ! La voiture termine là son voyage. La suite se fera dans le haillon débâché d'un camion de chantier. Pour ménager nos fessiers délicats, des matelas ont été jetés sur le sol. J'ai l'air ironique comme ça, mais promis, je le remercie de tout mon coeur, le gars qui a pensé à ça ! Parce que tant que la route a été lisse et goudronnée, ils nous ont fait rire avec leurs matelas humides et plein de sable qui salissaient nos jeans. Mais quand on est passé aux routes de terre, on était bien contents de les avoir !

Bref, avant d'en arriver là, la route était donc lisse et goudronnée. Au fur et à mesure qu'elle s'élève à flanc de colline, on distingue la mer, d'un bleu profond qui scintille sur un ciel par-fai-te-ment azuréen. C'est magnifique. Sur les flancs de la colline, des ouvriers montent et descendent, se passent des hottes, du bas jusqu'en haut, puis les font redescendre en les jetant dans le vide. Je mets du temps à comprendre, tant ça me semble énorme. Et pourtant. Ils sont en train de tapisser la colline de plaques de gazon artificiel. A la mano. Comme un POPB de plusieurs hectares. J'hallucine.

Au bout d'une heure de montée : nouveau stop. Maintenant, on prend ses pieds... et on grimpe. Il fait chaud et humide sous les arbres. Le sol est glissant et les lianes semblent vouloir s'agripper à nos chaussures. Le ranger qui ouvre le chemin marche à un rythme d'enfer. Des branches pendent de partout, il faut souvent baisser la tête. Des animaux crient : des oiseaux, des gibons, des tigres, nous explique le ranger... DES TIGRES ? Il est mort de rire ! Evidemment, c'est une blague. Ils ont tous été décimés par les Français. Mes deux compatriotes et moi, on se fait toute petites dans nos souliers de marche. Au bout d'une demi-heure, le jeune qui marche derrière moi demande grâce. On s'arrête 10 mn avant de reprendre. C'est qu'il nous reste une heure et demi de route, quand-même. Sur le coup, je pense que c'est une  nouvelle blague. Mais non !

Après la "balade", nouveau trip en camion. La route, d'abord en terre, devient caillouteuse. A cette altitude, la colline n'a pas encore été aménagée. Le camion est hoché dans tous les sens. On a arrêté de parler depuis longtemps et on se concentre pour éviter au maximum les chocs qui vous résonnent dans toute la colonne vertébrale. Il commence à faire froid aussi et le ciel se voile. A mesure qu'on progresse, le brouillard se fait de plus en plus épais. Quand on arrive à Bokor, on n'y voit presque rien. Céline, Bretonne qui vit en Australie depuis deux ans, a soudain le mal du pays. "Regarde, on dirait la Bretagne !" Et c'est vrai ! Le paysage, du moins ce qu'on en voit, ressemble à une lande d'herbes hautes et d'arbustes. Le brouillard se déplace en nappes qui laisse parfois entrevoir des ruines en pierres noires. On se croirait dans un film de Tim Burton. Jonnhy Depp serait sorti de la chapelle en ruine au bras d'Helena Bonham Carter, qu'on n'aurait même pas sourcillé !

L_ancien_casino_de_BokorL_ancien_bureau_de_posteEn tout cas, si Bokor se mérite, elle vous remercie bien de vos efforts. Le bureau de poste, la chapelle, l'hôtel (il s'appelait "Le kir royal", ce qui fait hurler de rire les Australiens ravis de traiter les Français d'incurables alcoolos), l'hôpital, et surtout le casino, plongés dans cette ambiance fantasmagorique laisseront des traces : les vieux murs percés par les balles tirées par les Khmers rouges lors du saccage de la ville, la végétation qui colonise tout, la lumière fantomatique, le silence, seulement rompu par le bruit des gouttes suintant des murs, les nuages entrant par les fenêtres et traversant les pièces... Tout ça donne une ambiance d'une mélancolie infinie qui n'est pas sans charme.

En repartant, notre guide nous a confié que le statut de Bokor, jusqu'à présent conservé dans son jus pour témoigner des ravages perpétrés par les Khmers rouges, était sur la sellette. Un complexe touristique est en cours de construction au bord du lac en contre-bas et le domaine pourrait bien lui être annexé. D'où les plaques de gazon...

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6 juin 2010

Kampot, le 6 juin

De retour de Kep, p'tit coup de blues ! Je vais prendre un verre au bar de la ghest-house d'en face. Toute seule, ce qui n'améliore pas mon moral. Jack y officie en tant que barman. Un jeune hollandais arrive, puis repart. Au comptoir, une Canadienne finit son curry. Une jeune femme s'installe et parle avec tout le monde. Elle sort sur la terrasse. Dix secondes plus tard, Jack la suit. Je vois leurs reflets dans le miroir accroché au dessus du bar : ils s'étreignent furtivement avant de regagner le bar comme si de rien n'était. La mini-chaîne joue du jazz. Il fait bon, les grillons chantent... L'amie de Jack engage la conversation, un peu en anglais, un peu en français. Elle est Allemande, mais son père est Français. De la région d'Arles, précise-t-elle. Elle est arrivée à Kampot il y a quelques mois et est "tombée amoureuse du coin". Du coup, elle fait quelques petits boulots ici et là. Je lui demande comment est la vie, ici. "Calme", me répond-elle mais que pour l'instant, ça lui convient. Ce qui la gêne, en revanche, c'est que les Cambodgiens pensent que tous les Blancs sont riches et que du coup, elle paye systématiquement tout plus cher. "Le prix est fonction de la couleur de ta peau." Elle loue ("avec Jack", me chuchotte-t-elle en apparté) une maison sur pilotis dans la campagne environnante. Elle adore cette vie ! "Le seul problème, c'est pour faire la grasse-mat'. Ici, la journée commence avec le lever du soleil et les voisins ne sont pas exactement discrets". Et puis, il y a les oiseaux qui viennent donner des coups de bec dans les vitres pour avoir à manger. Je lui conseille d'accrocher des CD aux fenêtres comme le font, à Paris, mes voisins d'en face pour éloigner les pigeons. Elle me regarde comme si j'étais un Prix Nobel ! "J'avais pas pensé à ça !" Je ne sais pas si elle l'a fait mais à la maison, maintenant, chaque fois que je regarde par la fenêtre, je pense à elle et à Jack !

De retour dans ma chambre, je prépare mes affaires. Demain, c'est Bokor.

6 juin 2010

Kep, dimanche 6 juin

SurvivanteCe matin, direction Kep. Kep est un village de pêcheur sur la Mer de Chine, situé à une dizaine de km de Kampot (3/4 d'heure de tuk-tuk, donc !). Du "temps des Français", c'était une cité balnéaire très prisée, paraît-il. Seules survivantes de cette époque, des villas en ruine qui regardent la mer depuis la corniche. Partis, les colons ! Elles sont aujourd'hui squattées par les ouvriers qui travaillent (en famille) à la réfection de la route en contre-bas.

 

La_plage_de_KepHormis le marché aux crabes, il n'y a pas grand chose à voir à Kep. Normalement, la ville sert surtout de point d'embarcation vers l'Ile du Lapin, où les touristes vont  bronzer et faire de la plongée. Je pars à la recherche d'une statue de "femme de pêcheur nue" dont parle mon guide. Diantre ! Une femme nue, au Cambodge, même s'il s'agit d'une statue, c'est plutôt rare ! Je finis par la trouver, au bout d'une jetée. On l'a recouverte d'un tissu blanc. Ouf, l'honneur est sauf !

Juste à côté du marché aux crabes qui fait la réputation de la ville, une quinzaine de barraques en bois, collées les unes aux autres, proposent du crabe à toutes les sauces. Un Blanc sort de l'une d'elles. Nonchalant, il s'assoit sur un siège en rotin et lance d'une voix bien sonore : "hé bé peuchère, i fé pas froid, ici !" Je suis morte de rire. "Votre accent me parait bien exotique !" "Mon acceng ? Quel acceng ?" Originaire de Toulon, "où il s'ennuyait", il a un jour décidé de partir. Il a tout vendu et est venu se poser là. "C'est sûr que c'est calme, ici, mais la vie est belle et je n'ai pas besoin de plus." Avec l'argennt de la vente, il a ouvert La Baraka, "la seule pizzeria à des kilomètres à la ronde !" Je le crois sans mal !

J'entre finalement au hasard dans l'une des gargotes. Je passe par la cuisine, pleine d'ombre et d'odeurs d'épices. Une vieille dame attend derrière les fourneaux. Un jeune homme assis mollement sur un banc, me sourit au passage. Une femme me conduit dans "la salle", en fait, le bout d'un ponton abrité sous un toit de palmes. Sous mes pieds, les vagues jouent gentiment contre les pilotis. Il fait bon, je suis bien. Je regarde la fameuse Ile du Lapin au loin dans la brume. On l'appelle comme ça parce qu'elle a la forme (très approximative, quand-même, mais bon) d'un lapin. Là, tout en déchiquetant consciencieusement mon crabe au poivre de Kampot, je pense que dans une semaine exactement, je serai de retour au bureau... et en réunion. Là, au milieu du clapotis des vagues, du petit vent tiède, de la lumière et du bleu de la Mer de Chine, ça me fait l'effet d'une autre vie. Bon, c'est pas tout ça, mais j'ai un crabe à finir !...

5 juin 2010

Kampot, samedi 5 juin

Kampot est située à 150 km de Phnom Penh, soit 4 h de bus. Enfin, en théorie, parce qu'en fait, nous, on aura mis plus de 6 h. Rapport aux multiples arrêts en pleine campagne pour cueillir des voyageurs qui attendaient patiemment notre arrivée.

A un moment, nous avons franchi une voie de chemin de fer en construction. Aucun ouvrier sur le chantier, rien que des rails et du ballaste. Mais tout le monde s'est levé en même temps pour voir l'ouvrage de ses propres yeux. Il faut dire qu'il n'y a plus de trains depuis des décennies au Cambodge, alors c'est un événement que de voir une voie ferrée. Même inutilisée.

Kampot_1Kampot_2Kampot est une petite ville charmante et très endormie construite le long d'un fleuve. Dans l'une des rues adjacentes, des agences immobilières m'attirent l'oeil. D'abord parce que jusqu'alors, je n'en ai pas vues beaucoup, ensuite parce qu'elles affichent toutes un panneau en anglais précisant qu'il s'agit de "ventes légales". Mi-perplexe, mi-amusée, je me demande ce que c'est, exactement, qu'une vente illégale ?

Fatiguée après ma journée de bus et aussi un peu désoeuvrée, je vais prendre un verre de blanc dans un joli bar tout en bois. Il fait chaud, j'ai faim et je suis vite pompette. Quand je repars, la nuit est tombée. L'éclairage est chiche dans les rues, je me trompe de rond-point et atterris... directement aux portes de la prison municipale située au coeur d'un joli quartier résidentiel. Levant les yeux vers le mirador, je vois un planton, calé dans un fauteuil, les pieds posés sur le rebord du muret de la tour. Les yeux fermés, il écoute de la musique d'une mini-chaîne stéréo dans l'air paisible du soir.

 

4 juin 2010

Phonm Penh, vendredi 4 juin

C_est_la_teuf__Avec_Phalla_et_Srey_Naebye_bye__choupi__Les_jumeauxSmiling_girl__Racin__l_adorable_monstreBallet_khmer_version_ninjaClem_et_les_beaux_gossesCoucou__Ratana__Samat_et_Srey_NaeRatana_et_ClemShampourey

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

C'est mon dernier jour à l'orphelinat aujourd'hui. Avec Kirsten et Matthias, qui partent en même temps que moi, on a organisé une fête, avec plein de bonbons, du Coca et des petits cadeaux. Les mômes sont surexcités. Phalla et Srey Nae ne me lâchent pas d'une semelle. Ca fait plaisir et en même temps... Mais j'ai pas envie d'en parler.

4 juin 2010

Phnom Penh, jeudi 3 juin

Mademoiselle_Srey_VinParmi les 10 bébés que compte l'orphelinat, Srey Vin est la seule petite fille. Etonnant, non ? Les filles seraient-elles plus précieuses ? L'explication est donnée par une des soeurs de l'orphelinat où travaille Benoit : "Une fille peut toujours servir : on peut la faire travailler, lui faire faire le ménage, la marier. Alors on les garde. Les garçons sont moins utiles."

Srey Vin est donc la seule fille. Elle reste seule la plupart du temps. Son regard est triste, vide. Elle ne joue que rarement et plus rarement encore avec les autres. Elle ne sourit pas, elle ne pleure pas, elle ne demande pas d'attention ni de câlins. Au contraire. Quand elle se sent sollicitée, elle détourne les yeux et les fixe obstinément loin derrière ton épaule. Elle accepte d'être portée, mais pas de rester dans tes bras. Les nannies ne s'en occupent que très rarement. Pendant un mois, j'ai essayé de la faire réagir. Je lui ai parlé, essayé de la faire jouer, transbahutée dans une vieille poussette à bout de course, de la cajoler, de la stimuler... Rien. Aucun progrès. Le dernier jour, assise dans la salle de réunion avec Samat et le directeur de l'orphelinat, nous faisons le bilan de mon séjour parmi eux. Quand soudain, je vois du coin de l'oeil la demoiselle passer prudemment la tête au coin de la porte en regardant vers moi. Incroyable, son regard accroche le mien ! Elle sourit et hop, se planque derrière la porte ! Je rêve ! Le temps que je réalise, elle retente une sortie, et voyant ma tête, éclate d'un gros rire. Comme je tente de me recentrer sur la discussion, rebelotte ! Dès que je le peux, je m'échappe et rejoins la nursery. Elle est assise sur l'un des lits. Ravie, je me penche vers elle, tout sourire. Elle détourne le regard et fixe le mur. Mademoiselle Srey Vin a refermé la porte à double tour.

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